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Les jardins de Claude Monet à Giverny : vous les connaissez fleuris et hauts en couleur d’avril à octobre mais savez-vous que pendant les mois de fermeture, les jardiniers s’attellent à leur préparation pour la saison suivante ? Jean-Marie Avisard, Chef jardinier des lieux, nous a ouvert les portes et nous raconte comment les équipes continuent de faire vivre cette œuvre de Claude Monet !


La préparation de la saison printanière

Célèbre peintre impressionniste du XIXe siècle, Claude Monet pose ses valises à Giverny en 1883 et y passera le reste de sa vie. Au fil des années, il façonnera le Clos Normand (bordant sa maison) et le jardin d’eau à son image.

Aujourd’hui, les équipes s’appliquent à perpétuer cette œuvre d’année en année. Ainsi, chaque hiver, le jardin du Clos Normand est refait à neuf et tout commence dès la fermeture des lieux au mois de novembre : les plantes qui resserviront la saison prochaine et qui craignent le gel telles que les dahlias et fuchsias sont mises à l’abri. Les autres, comme les asters, sont coupées. L’ensemble des massifs est ensuite bêché à la main, c’est-à-dire que la terre est retournée afin de préparer le sol. Avant Noël et pour anticiper l’arrivée des premières gelées, les bulbes sont plantés, suivis des plantes dites bisannuelles (les premières à fleurir avec l’arrivée des beaux jours) telles que les pensées, myosotis et pâquerettes. Puis les allées du jardin sont renflouées en gravier.

Maison de Claude Monet, Giverny © Max Coquart, Best Jobers
Devant la maison de Claude Monet en saison estivale

Du côté du jardin d’eau, le feuillage des nymphéas est coupé à la faucille, puis ramassé afin qu’il ne pourrisse pas à la surface. Ces dernières sont alors en « dormance » dans le fond de l’étang pendant la période hivernale, ce qui permet de les protéger du gel. Dès que les températures printanières pointent le bout de leur nez (aux alentours de 16°), les nymphéas remontent à la surface de l’eau tandis que les premières fleurs apparaissent vers le mois de juin.

Les jardins de printemps sont ainsi prêts pour l’ouverture au 1er avril et resteront en place jusqu’aux Saints de Glace (mi-mai à peu près).




Un travail en continu

Les plantes d’été vont ensuite remplacer celles du printemps : les dahlias, impatiens, bégonias et géraniums qui étaient jusqu’alors conservées dans les serres vont venir revêtir les allées fleuries du Clos Normand.

Mais pendant la saison estivale, le travail ne s’arrête pas là ! L’entretien des lieux est permanent : les nombreux rosiers sont régulièrement taillés, les mauvaises herbes arrachées et les projections de cailloux enlevées des parterres fleuris.

Le jardin d’eau est quant à lui nettoyé quotidiennement : en effet, les nymphéas ont la particularité de se développer rapidement jusqu’à pouvoir recouvrir toute la surface de l’étang. Alors pour qu’ils conservent la même disposition que celle du célèbre tableau de Claude Monet, avec ces fameux reflets d’eau qu’il appréciait tant, leur feuillage est régulièrement taillé et les mauvaises herbes qui remontent à la surface sont ramassées.

© Max Coquard, Bestjobers
Bassin aux nymphéas

Une œuvre à l’image de Claude Monet

Bien plus que de simples jardins, les lieux constituent une œuvre d’art en plein air, que les équipes perpétuent au fil des saisons. En vous y promenant, avez-vous remarqué les bambous du jardin d’eau, le saule pleureur au bout de l’étang, les glycines sur le pont d’inspiration japonaise, le hêtre pourpre juste à côté ou encore l’arbre If devant la maison de Monet ? Eh bien sachez que le peintre les a connus et que 95 ans plus tard, ils occupent toujours les lieux.

© Teddy Bear photos
Le pont japonais et ses glycines

Côté fleurs, si de nombreuses variétés de l’époque ont disparu, certaines ont récemment fait leur réapparition : en 2019, une ancienne photo de Claude Monet devant sa maison a permis d’identifier la variété de géraniums qu’il plantait en été. Et si cette dernière avait disparu chez les producteurs de graines, les équipes sont parvenues à retrouver quelques boutures à l’arboretum de Versailles- Chèvreloup et à les multiplier pour les exposer dès l’été 2020.


Une démarche éco-responsable

Au fil des saisons, les équipes perpétuent l’œuvre de Claude Monet en adoptant une démarche écoresponsable. C’est ainsi que 80 % des plantes présentes dans les jardins sont produites sur place. Cela permet également à chaque jardinier de disposer d’une large palette et y inscrire sa patte artistique. Ainsi, chaque année, les jardins évoluent.

En vous y promenant, vous remarquerez que les massifs sont constitués de multiples variétés de fleurs aux diverses nuances. Par exemple, un massif rouge ne sera pas uniquement constitué d’une seule espèce mais bien d’une multitude qui amènera différentes nuances de cette couleur. Et ce sont ces petites touches de couleurs qui rappellent les tableaux de Monet.

© Baptiste Riffard

Côté entretien, pas de produits chimiques : ici, tout est naturel. Les engrais sont remplacés par des granulés de fumier séché et le purin d’ortie est utilisé comme traitement. Contre les pucerons, la chaîne alimentaire se met en place : d’autres petits insectes (appelés des auxiliaires) vont s’occuper de manger les nuisibles.

Dans le jardin d’eau, pas question d’utiliser un bateau motorisé : la barque est privilégiée ! Côté filtrage, l’eau vient directement de la nappe souterraine et va alimenter l’étang tout en respectant l’équilibre précaire et fragile entre la lumière, les plantes et les poissons : si trop d’eau est amenée, celle-ci va s’éclaircir, laissant entrer la lumière jusqu’au fond et créant un déséquilibre. Au contraire, s’il n’y en a pas assez, l’étang va s’atrophier, des algues vont se former et étouffer l’étang. Il s’agit d’un juste milieu à trouver et une adaptation aux conditions météorologiques.




Quelques mots sur le Chef jardinier

Jean-Marie Avisard est Chef jardinier depuis maintenant 3 ans. Après une formation de jardinier-paysagiste, il intégrera quelques années plus tard les jardins en tant que saisonnier avant d’être embauché. Très vite, il deviendra responsable du célèbre jardin d’eau puis Chef jardinier.

Aujourd’hui, il ne se voit pas ailleurs et définit les jardins de Claude Monet comme le graal pour tout jardinier, un véritable honneur de perpétuer et faire vivre l’œuvre du peintre impressionniste !


© Voyages impressionnistes